Voilà quelques semaines que cette satanée Miss Je-Suis-Mieux-Que-Tout-Le-Monde, j'ai nommé Juliet Brown, avait encore frappé. Cependant cette fois, c'était à moi qu'elle s'en était prise ! Et comment ! La musique est ce qui m'est le plus cher et cette saleté ose me prendre mes partitions parce qu'elle a eut le malheur de déraper sur... deux d'entres elles ! HELLOW. Elle est mal placée pour se plaindre, on n'est pas dans un hôtel cinq étoiles ici ! Il y a du vent, il n'y a pas de place, bref, je suis désolée mais je suis pas la pire ici, loin de là ! Alors j'avais tout planifié. J'avais récupéré mes partitions quand Miss Je-Suis-Le-Chef-Alors-Je-Vous-Emmerde avait le dos tourner. J'aurais adoré pouvoir la faire chier davantage. Malheureusement avec elle je devais la jouer fine, ce qui n'était pas ma spécialité. Personnellement, je l'aurais bien virée dans le labyrinthe de nuit, et laissé les Griffeurs en faire leur affaire ! Quoi que cette garce aurait été capable d'y survivre... En attendant, je pensais déjà bien la faire rager : elle n'avait pas réellement de pouvoir sur moi. Oui bien sûr, elle pouvait m'envoyer au Gnouf, et alors ? J'y vais moi quand il n'y a personne ! C'est calme, et si on fait abstraction de l'odeur ( chose à laquelle on s'habitue après voir vécu plus d'une semaine avec ces bande de bachi-bouzouk ), ça peut être un endroit très sympa ! D'ailleurs je suis sûre que c'est ce qui l'emmerde le plus : je me fiche de ce qu'elle fait, et si ça m'énerve... elle sait que je n'hésiterais pas à me battre avec elle. Le labyrinthe, les Griffeurs ? Je n'en n'ai pas peur. Quand on a rien à perdre, on peut bien tout risquer comme on dit. Là encore elle perd son emprise, elle peut me jeter dans la fosse aux lions ( ou présentement, aux Griffeurs ), à elle d'avoir ça sur la conscience plus tard... si tenté qu'elle en ait une. Moi, pour ce que ça me fait... je ne suis pas comme ceux qui tiennent effectivement à leur vie, et qui son là " Non pitié, ne me fait pas ça, tout mais pas ça, je ne suis pas prêt à mourir pitiéééé... " en pleurant toutes les larmes de leur corps. J'ai toujours eus pitié d'eux d'ailleurs. Et de surcroît, si elle pense que la mort et le pire qu'elle puisse leur faire, elle est bien loin du compte. Il y a des destins bien pire que la mort.
Je m'étais rendue au ruisseau, non pas dans l'optique de frimer en mode " j'ai récupéré mes affaires pétasse ! ", mais plutôt parce que c'était un coin que j'aimais bien. Le peu de vue qu'on y avait était plutôt sympathique, et j'aimais à penser que je pourrais éventuellement noyer quiconque me chercherait un peu trop. Non plus sérieusement. Personne ne vient jamais ici, ils sont tous bien trop occupé ailleurs, à chercher une sortie inexistante, à faire de la bouffe immangeable et autre. Il n'y a pas de sortie ici. Et si il y en a effectivement une, alors elle se trouve au dernier endroit où on aurait pu penser à aller. Je suis coureuse. J'ai déjà tenté le coup. Cherché dans des endroits saugrenus. Pensé qu'il ne fallait peut-être pas courir sur des kilomètres, que c'était peut-être une ruse alors qu'il y avait peut-être un bouton, une porte, quelque chose dans les murs. Ou sur le sol. Rien. Uniquement cette inscription : WICKED is good ; le méchant est bon. La bonne blague. Je ne sais pas quel est l'imbécile qui a mit ça un peu partout, mais il n'a vraiment rien dans la cervelle.
Les yeux rivés sur l'eau, je réalisais combien j'étais aussi paumée que chacun d'entre eux ici. Les souvenirs les plus importants m'étaient revenu en mémoire, j'étais redevenue celle que j'avais toujours été. Et la seule chose qui m'avait toujours fait tenir, c'était la musique. Heureusement ma voix était bien la seule chose que ces gens, quels qu'ils soient, qui nous avaient mis ici, n'avaient pas pu m'enlever. Mais le reste me manquait... mon piano par exemple. Un public. Une grande école d'art dramatique. Broadway... Je ne sais plus ce que c'est, mais je crois que c'est très important pour un chanteur. Ca l'était pour moi en tout cas. La première fois où j'avais voulu chanter pour moi, ici, dans mon coin, seule chose réconfortante, rassurante, familière pour moi, je m'étais souvenu de quelques mots, échangé avec quelqu'un dont je ne me souvenais pas, mais qui devait sans doute être un bon ami. " Il n'y a pas d'orchestre... ! " " Crées-en un. Dans ta tête. " Depuis, à chaque fois que je n'avais pas de mélodie d'arrière fond, je le créais. Ou le recréais plutôt. C'est étrange vous savez. Savoir tout et rien à la fois. Ne plus rien se souvenir du solfège par exemple, mais être capable de retranscrire des notes, en sachant qu'elles sont correcte, sans savoir pourtant exactement ce qu'elles veulent dire. Les mains dans l'herbe, je laissais virevolter mes doigts comme sur un piano, me remémorant la mélodie.
-Have you ever fed a lover with just your hands ? Closed you eyes and trusted, just trusted ? Have you ever thrown the fistful of glitter in the air ? Have you ever looked fear in the face and said " I just don't care " ? It's only half past the point of no return, the tip of the iceberg, the sun before the burn. The thunder before the lightning and the breath before the phrase, have you ever felt this way... ?
Ce qui est dommage quand il n'y a pas vraiment de musique, c'est qu'on entend tout : ainsi j'avais pu entre quelqu'un venir derrière moi. Sans me retourner, je lâchais assez sèchement.
-Qu'est-ce que tu me veux ?
Je n'avais que faire de qui était derrière. Je voulais être tranquille. Faut que j'aille dans le labyrinthe pour ça ? Parce que je le ferais avec plaisir !