Date d'inscription : 30/03/2014 Messages : 162 Points : 128 Localisation : Au Centre WICKED Emploi : Grand manitou des Créateurs
| Jeu 19 Mar - 22:38 | |
« Oyez oyez bonnes gens ! Approchez et venez écouter ! Il est bientôt l’heure de l’histoire du soir de votre troubadour préféré. Approchez et oyez la complainte de Gazal, trahie par la vie et livrée à la violence des hommes. Belle demoiselle aux ailes translucides et aux yeux clairvoyants, l’enfant libellule, la libellule enfant. Son vaste monde était fait de rêves. Tous les soirs, à l’heure du Grand Mal, Son imagination, comme d’un arbre la sève, Faisait naître sans effort une réalité idéale. La fillette admirative contemplait alors La silhouette nocturne parée de voiles noirs. La nuit plantait son obscur décor ; Se reflétant dans les lacs miroirs.
Rêve petite fille rêve !
Lorsqu’elle se trouvait assoiffée, Elle allait s’abreuver de paroles Auprès des grands arbres moribonds. Pendant des heures elle les écoutait conter A travers les grincements de leurs racines molles Des récits aux allures de chansons. Pour qui n’était pas avisé, Elle aurait pu paraitre folle, A évoluer dans sa déraison.
Rêve petite fille rêve !
Elle vivait seule, elle survivait loin de tout. Peu la croisaient dans ses pérégrinations. Son quotidien était sans-le-sou Et ne lui causait guère de préoccupations. Mais ce que la fillette ignorait C’était que dans son esprit embrumé La maladie peu à peu la gagnait ; Dans l’ombre, la Braise grignotait.
Rêve petite fille rêve !
La pauvrette, petite âme isolée, Finit par trouver le temps long. Les arbres, le sable et les rochers Sont de bien piètres compagnons. Qu’importe le temps passé à demander, La nature refuse toute discussion. C’est pourquoi elle se mit à espérer En observant la civilisation.
Rêve petite fille rêve, mais reste dans ton cocon !
A un convoi de survivants passant, Gazal finit par se présenter. Fort étonnés par cette enfant Ils décidèrent de la protéger. Heureuse d’être accueillie La petite fille se laissa aller, Racontant ses péripéties Pour se faire accepter.
Prend garde petite fille, prend garde à l’étranger !
Quelques-uns restaient dans leur coin, Préférant l’observer de loin ; Tandis que d’autres s’approchaient, Dans le but de mieux écouter. Mais des inquiétudes circulaient Au sein de la petite assemblée. Que faisait une enfant sans famille ni maison ? Quelqu’un se risqua à poser la question, Et Gazal fut contrainte à conter son abandon.
Des cris de peur fusèrent, Certains s’écartèrent en courant. La fillette ne savait plus que faire Au milieu de tout cet emportement ! C’est qu’à travers son récit, Les nomades avaient compris. Elle sentait désormais L’infectée à plein nez !
Sauve-toi vite petite libellule, sauve-toi !
Après quelques minutes de panique, La peur fit place à la colère La situation de la demoiselle devint critique Lorsqu’elle se vit entourée d’armes de guerre. Elle qui était pourtant pacifique Avait une place réservée au cimetière ! Elle ne pouvait imaginer dans son monde magique Qu’il puisse exister si grand calvaire.
Les nomades commencèrent à se rassembler. Il devenait désormais évident, Avec leurs sabres et leurs couteaux tirés Que la menace émanant de l’enfant Se devait d’être éradiquée Sans plus de perte de temps. Leur attitude de carnassiers Laissait deviner leur plan.
Gazal était incapable de bouger, Ses membres refusaient de lui obéir. Elle était forcée de regarder s’approcher Ces hommes, ces démons, ces vampires. Elle qui fermait les yeux face au mal Y était désormais confrontée Sa première pensée fut pour son quotidien si banal, Qu’elle se mit soudain à regretter.
C’est alors, au milieu de son cauchemar, Qu’un petit insecte apparut. Comme porteur d’un vent d’espoir, Virevoltant au centre de la cohue Il indiqua à la demoiselle une échappatoire, Entre les caravanes et les charrues. Elle s’élança, traversant sans égard, Esquivant haches et épées tendues
L’obscurité s’en va et s’en vient à ses heures, Il était temps ce soir-là qu’elle fasse son apparition. La petite fille profitant que les couleurs se meurent S’enfuit, chevauchant la nuit à califourchon. Elle disparut ainsi, sans plus de terreur, Laissant sa silhouette se fondre dans l’horizon. Doucement elle se laissa aller aux pleurs, Tout en prenant de nouvelles résolutions.
Fini les soucis, fini les ennuis. Seuls ses semblables la comprenaient, Ces personnes qui respiraient la folie, Ceux qui sentaient « l’infecté à plein nez ». Quant aux autres, pour sa survie, Il lui faudrait les éviter. C’était son nouvel interdit, Sa résolution à jamais.
Rêve petite fille, envole-toi encore !
Oyez citoyens, le message est clair. Si d’aventure vous êtes différent de vos compagnons Et si d'un danger ou presque vous avez l'air, C'est sans vergogne aucune qu'ils vous banniront ! Alors prenez garde aux inconnus, aux premiers venus et aux personnages tordus, qui sait quelles intentions se cachent derrière les faux semblants et les visages avenants ? Mais ne finissons pas sur une note si terne voulez-vous, on avait si bien commencé qu’il serait dommage de tout gâcher ! Gazal me direz-vous, que lui est-il donc arrivé ? L’histoire conte qu’elle ne grandit jamais, restant l’incarnation de la jeunesse et de la pureté. Quel drame il est que la maladie choisisse de frapper une si bien innocente née ! Mais de sa vie elle fut récompensée, l’on dit qu’un jour, le rêve rejoignant la réalité la demoiselle a pris ses ailes teintées et s’est envolée. L’enfant libellule la libellule enfant… Qui sait peut être que vous la croiserez ? »
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